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Le BDSM et la domination au Cinéma

Preaching to the Perverted

Sortie : 1997
Affiche du film Preaching to the Perverted

Présentation officielle / Extrait

Titre original : Preaching to the Perverted
Réalisation : Stuart Urban
Sortie : 1997

Synopsis

La dominatrice américaine Tanya Cheex (Guinevere Turner), ancienne star du porno, se produit à Londres dans son club House of Thwax dans des shows BDSM très privés. Elle règne sur toute une troupe de soumis, parmi lesquels sa fidèle assistante Eugenie, et son soumis attitré, qu’elle vient de congédier brutalement parce qu’il a eu l’outrecuidance de vouloir la pénétrer.

Ses activités déchaînent la colère des puritains ultra-conservateurs, et le député Henry Harding (Tom Belt) décide de se lancer dans une croisade pour éradiquer cette « saleté ». Mais Scotland Yard lui démontre qu’il n’a pas de preuves, et que pour en obtenir il doit infiltrer le club de l’intérieur. Harding engage alors le jeune Peter Emery (Christien Anholt) , brillant informaticien et chrétien convaincu (sa société s’appelle Holy Hardware) mais toujours vierge et pudique. Par le site Internet du club, Peter parvient à entrer en contact avec Tanya elle-même, qui le convoque pour le samedi suivant.

Peter s’équipe de vêtements en latex, et de lunettes noires qui dissimulent une caméra. Il entre dans le club où, effaré, il croise une faune étrange et assiste à une vente d’esclaves. Il rencontre brièvement Tanya qui le subjugue par sa beauté. Mais Harding est déçu par les vidéos qu’il ramène et qui ne constituent pas des preuves suffisantes : Peter doit véritablement s’intégrer dans le monde de Tanya, malgré sa répugnance.

Peter fait irruption au milieu d’un tableau du spectacle. Il doit accepter de se faire poser des anneaux sur les tétons en signe d’allégeance à Tanya. Mais les images recueillies ne satisfont toujours pas Harding qui lui ordonne de poursuivre son intégration. Peter retourne donc au club et commence son apprentissage de soumis de Tanya. Sa première mission est de lui donner du plaisir. Il est tellement inexpérimenté que Eugenie doit lui montrer comment faire un cunnilingus. Il s’exécute, mais est dégoûté. Harding lui révèle alors qu’il a une liaison depuis longtemps avec sa secrétaire miss Wilderspin, mais qu’ils n’ont jamais fait l’amour. Il consulte un avocat qui lui explique que pour obtenir un procès il a besoin des noms des protagonistes.

Le lendemain, Tanya emmène Peter à un show privé dans un château. Les esclaves sont mis en cage dans la chapelle et Eugenie est chargée de s’en occuper. Pendant ce temps Peter « s’occupe » de Tanya, qui lui explique que la domination et la douleur infligée est sa manière d’affirmer son pouvoir, et qu’elle n’est pas une prostituée puisqu’aucun de ses riches clients n’a couché avec elle. Peter découvre que la propriétaire du château, Mrs Cutts Watson, est la patronne d’une chaîne de télévision et aime être flagellée, tandis que Tanya découvre que Peter travaille pour le Parlement.

Ulcérée par cette découverte, Tanya commence par punir Eugenie pour n’avoir rien dit, puis oblige Peter à tirer le chariot d’Eugenie comme un poney, et l’attache en suspension pendant qu’elle l’interroge sur sa mission d’infiltration. Elle le récompense de sa soumission en dormant avec lui, toujours sans pénétration. Pendant ce temps, une dame du voisinage appelle la police pour dénoncer les actes « déviants » commis dans le château. La police arrive trop tard et ne trouve que les propriétaires des lieux.
Tanya propose à Peter de rester avec elle comme son esclave mais il refuse. L’avocat annonce qu’il a cette fois de quoi lancer une procédure. Tanya est prévenue, et pense que Peter l’a dénoncée. Eugenie découvre que Tanya a jadis été abusée par son père et que c’est pour cela qu’elle refuse d’avoir une relation amoureuse normale, que ce soit avec elle ou avec Peter.

Tanya avoue cependant son amour à Peter et, alors qu’ils ont un peu trop bu, elle lui révèle son fantasme « le plus noir » : être mariée et avoir des enfants. Ils en font un jeu, elle entre avec lui dans une chambre en robe de mariée. Au matin, elle découvre avec horreur qu’ils ont fait l’amour et le chasse. Eugenie découvre que Peter travaillait pour Harding. Jalouse, elle envoie à Harding une photo de Peter en esclave-poney. Elle essaie de convaincre Tanya de fuir pour éviter la prison mais elle refuse.
Peter avoue à Harding ce qui s’est passé entre Tanya et lui mais il affirme qu’il n’est pas amoureux d’elle. Le procès commence, et Tanya est accueillie bruyamment par ses fans à l’entrée du tribunal. A Peter qui lui suggère de plaider coupable et d’abandonner ses activités, elle reproche sa trahison et son hypocrisie et lui crache au visage. Les vidéos prises par Peter au club sont projetées dans la salle d’audience. Peter surprend Miss Wilderspin en train de regarder avec délectation les vidéos du club.
Le lendemain Peter doit témoigner devant la cour de l’authenticité des vidéos, mais il se rétracte, affirmant que tous les actes présentés ont été simulés. Le juge met fin au procès et libère Tanya et son équipe, mais Peter est condamné pour parjure et est emprisonné. Même sous la pression des journalistes, il refuse de changer sa version. Harding, dont l’œuvre moralisatrice est réduite à néant, décide d’épouser miss Wilderspin.

Neuf mois plus tard, Peter est libéré. Tanya vient le chercher, et il découvre alors qu’elle a donné naissance à une petite fille, fruit de leur unique nuit d’amour. Tanya poursuit son activité dans House of Thwax, Peter devient son manager et Eugenie allaite l’enfant.

Commentaires

« Preaching to the Perverted » n’est pas le premier film à s’attaquer à l’hypocrisie des élites politiques britanniques pour ce qui touche au sexe. « Personal Services » (1987) de Terry Jones décrit notamment le parcours de la tenancière de bordel Cynthia Payne qui fournissait la même élite qui la condamnera quand elle deviendra trop gênante.
Ici, le scénariste-réalisateur et producteur Stuart Urban s’investit clairement dans un projet qui lui tient à cœur. Le fétichisme et le SM sont très populaires au Royaume-Uni, pays socialement très codé – comme c’est le cas au Japon. Simple défouloir, lâcher prise ou véritable mode de vie, les pratiques SM ont cependant toujours fait l’objet d’une tolérance plutôt que d’une acceptation.

Au fond « Preaching to the Perverted » est une comédie romantique audacieuse et décalée, ainsi qu’une satire sur les mentalités des auto proclamés gardiens de la morale. Après tout, qu’importe les pratiques sexuelles de chacun, tant qu’elles sont pratiquées entre adultes et basées sur le consentement. Autre aspect intéressant, l’utilisation d’internet alors naissant par les communautés « déviantes » pour communiquer, se rassembler et braver les interdits.

« Preaching to the Perverted » est une satire intelligente qui allie légèreté, humour noir, et exploration sociétale des tabous. Ce film se distingue par la manière dont il aborde des sujets controversés comme le BDSM, non pas dans une optique sensationnaliste, mais avec un mélange d’ironie et de respect pour la liberté d’expression et les choix individuels.

Le ton décalé et comique permet au réalisateur de traiter de thèmes sérieux (la sexualité, la liberté et l’oppression morale) sans sombrer dans le didactisme. La confrontation entre le monde strictement conservateur, représenté par le politicien Henry Harding, et le monde libéré du BDSM, représenté par Tanya, met en lumière les hypocrisies sociales autour de la sexualité et du contrôle des corps.
Guinevere Turner, dans le rôle de Tanya Cheex, apporte une présence magnétique et joue avec une autorité séduisante et désinvolte, ce qui rend son personnage à la fois captivant et fascinant. Christien Anholt incarne bien l’archétype du jeune homme naïf et mal à l’aise dans cet univers, et son évolution est à la fois crédible et divertissante.

Quelques exemples des types de scènes BDSM que l’on voit dans le film :

1. Performances publiques et fétichistes : l’une des premières scènes marquantes montre Tanya Cheex animant des soirées fétichistes dans des clubs BDSM. Ces soirées mettent en scène des performances théâtrales, où les participants s’habillent de latex, cuir, et autres tenues fétichistes. Il y a des démonstrations de soumission et de domination, mais ces scènes sont présentées avec un côté presque carnavalesque, stylisé, et souvent exagéré pour l’effet comique et visuel.

2. Fouet et flagellation : le fouet est un symbole central dans le film. Tanya, en tant que dominatrice, utilise régulièrement le fouet sur ses soumis lors des scènes publiques. Cependant, ces scènes sont souvent exagérées ou jouent sur l’ironie, avec des gestes théâtraux et exagérés, en particulier lorsque Peter assiste à ces séances pour la première fois, choqué et fasciné à la fois.

3. Bondage : le bondage est un autre élément clé représenté dans le film. On voit des personnages attachés avec des cordes ou des chaînes, dans des positions variées. Ces scènes montrent la soumission volontaire des participants, dans le cadre de jeux de rôle consentants, mais le tout est souvent présenté avec un ton de ludisme et de provocation, plutôt que d’intensité dramatique ou érotique.

4. Cages et contrôle : une scène marquante montre un personnage enfermé dans une cage suspendue, un des clichés visuels de la soumission dans le BDSM. Là encore, c’est présenté de façon stylisée et théâtrale. Le film intègre souvent ces éléments visuels comme des métaphores de la domination plutôt que comme des représentations réalistes des pratiques BDSM.

5. Jeux de rôle et humiliations légères : on voit également des scènes où les personnages participent à des jeux de rôle impliquant des humiliations consenties, comme la mise à genoux de certains personnages ou des situations où ils doivent obéir à des ordres publics. Mais ces scènes sont souvent légères dans leur ton et visent davantage à faire rire le public qu’à représenter des situations de pouvoir intense.

6. Exhibitions et tenues fétichistes : les tenues, les accessoires et l’esthétique fétichiste sont omniprésents dans le film. Des corsets en cuir, des combinaisons de latex, et des accessoires comme des colliers, menottes, et autres attributs sont utilisés pour créer une atmosphère extravagante et décalée. Ces scènes jouent beaucoup sur l’esthétique visuelle et stylisée du BDSM.

7. Electrostimulation et autres gadgets BDSM : une scène humoristique introduit un gadget futuriste de stimulation électrique utilisé lors d’une performance. Là encore, l’objectif est plus de créer un effet comique et absurde que de reproduire fidèlement des pratiques BDSM.
Tonalité générale des scènes BDSM : le film traite ces scènes avec un mélange de provocation, de satire, et de stylisation. L’objectif n’est pas de représenter de manière réaliste ou sérieuse la culture BDSM, mais plutôt de s’en servir comme toile de fond pour explorer des thèmes comme la liberté individuelle, le puritanisme, et l’hypocrisie morale.

Plutôt que de se concentrer sur des aspects très intenses ou sombres du BDSM, le film choisit une approche légère et souvent comique, tout en respectant l’idée que les pratiques BDSM sont fondées sur le consentement et la liberté d’expression.