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Le BDSM et la domination au Cinéma

R100

Sortie : 2013
Affiche du film R100

Présentation officielle / Extrait

Titre original : R100
Réalisation : Hitoshi Matsumoto
Sortie : 2013

Synopsis

Takafumi Katayama (Nao Ōmori), est un vendeur de meubles tranquille et réservé, qui vit une existence monotone. Sa femme Satsuko est dans le coma depuis des années, et il élève seul leur jeune fils Arashi avec l’aide de son beau-père. Déprimé par sa situation, Takafumi cherche à échapper à sa vie quotidienne en s’inscrivant à un club BDSM secret et mystérieux appelé Bondage.

Le contrat qu’il signe avec ce club stipule que pour une année entière, il sera soumis à diverses « dominatrices » qui apparaîtront à des moments aléatoires pour le torturer, le dominer, ou l’humilier en public, mais toujours selon leurs propres règles. La règle principale du club est qu’il ne peut pas mettre fin à l’accord avant la fin de l’année, peu importe à quel point les sessions de domination deviennent intenses.

Takafumi rencontre rapidement une première dominatrice, à qui il parle de Beethoven dans un bar, mais qui pour toute réponse lui lance un coup de pied dans le nez. Plus tard dans la rue, la jeune femme le roue de coups et lui fait dévaler un escalier avant d’écarter son manteau, révélant des sous-vêtements de cuir noir. Un soir après le travail, une autre dominatrice vêtue de cuir noi, vient perturber son repas en écrasant d’un coup sec chacun des plats qui lui sont présentés.

Une routine s’installe, entre les rendez-vous fixés par une dominatrice pour lui infliger divers traitements (y compris l’absence au rendez-vous), son travail au magasin et les visites à sa femme à l’hôpital. Le père de Satsuko envisage d’arrêter les machines qui la retiennent en vie. Takafumi, en rentrant à la maison, se fait sauvagement frapper, et arrive chez lui avec les croquettes du dîner toutes écrasées.

Les séances de domination prennent une tournure incontrôlable, allant jusqu’à menacer la sécurité de sa famille. Katayama cherche désespérément à échapper à l’emprise du club, mais le contrat est inébranlable, et les dominatrices se révèlent plus cruelles et sadiques que prévu. L’une d’elle vient le frapper dans les toilettes du magasin où il travaille, un homme mystérieux vient le prévenir qu’il se met en danger. De retour à la maison, il trouve un pantin avec une corde au cou, qu’une « dame en noir » a donné à son fils.

Une autre dominatrice, la « Reine des Voix » s’introduit même dans la chambre de Setsuko et brûle Takafumi avec de la cire. Il a alors l’impression d’entendre Setsuko lui parler. N’en pouvant plus, il va raconter son histoire à la police, qui se déclare incompétente, puisqu’un contrat a été signé entre adultes consentants. De retour chez lui, il est assailli par une dominatrice qui le déshabille, le ligote sur une chaise et le frappe. Quand Arashi surprend la scène, il se retrouve lui aussi ligoté en suspension dans les airs.

Une autre femme arrive alors dans l’appartement, la « Reine de la Salive », qui crache sur Takafumi à chaque fois qu’elle lui parle. Elle sort des ingrédients d’une mallette au logo de Bondage et prépare différentes mixtures pour agrémenter ses crachats. Mais à la fin elle tombe en arrière dans l’escalier et git sur le sol, morte. Le téléphone sonne, Tafakumi parvient à se libérer pour répondre et entend une voix menaçante l’accuser d’avoir tué la dominatrice. Au « salon aquatique » les autres filles font l’éloge funèbre de la Reine de la Salive.

Takafumi s’enfuit en voiture avec Arashi, poursuivi par une voiture de Bondage. Un mystérieux motard lui vient en aide, prend en charge Arashi et lui demande de protéger son beau-père. Il s’élance sur la moto. Mais Arashi s’enfuit, tandis que la PDG de Bondage arrive à Tokyo. Le Motard arrive seul à l’hôpital, mais trouve Satsuko dévorée par « la Reine de la Gloutonnerie ».
A ce moment apparait une partie de l’équipe du film, qui ne comprend plus où veut en venir le réalisateur, un vieillard de bientôt 100 ans. L’un d’entre eux affirme qu’il faut avoir 100 ans pour comprendre le film.

Takafumi arrive chez son beau-père mais y trouve la Reine des Voix, qui a imité la voix de son beau-père au téléphone, et la Reine de la Gloutonnerie qui l’a dévoré. Il abat les deux femmes avec le revolver que lui a donné le Motard, mais il est aussitôt menacé violemment au téléphone par la PDG, une dominatrice à l’allure particulièrement sévère. Une unité d’élite encercle la maison, et la PDG arrive en personne sur les lieux.

Takafumi se défend vaillamment avec des grenades qu’il a trouvé dans une mallette de Bondage. Mais la PDG parvient à entrer dans la maison et s’empare de lui. Takafumi retrouve son fils mais présente une grossesse avancée.

Commentaires

« R100 », réalisé par Hitoshi Matsumoto, est une comédie noire et un drame absurde qui explore la soumission, la domination, et le BDSM à travers une approche à la fois surréaliste et humoristique. Le titre « R100 » fait référence à une classification fictive des films, indiquant qu’il est réservé à un public âgé de plus de 100 ans en raison de son contenu complexe et dérangeant.

Le BDSM est une métaphore de la souffrance quotidienne et du besoin de contrôle dans la vie d’un homme accablé par ses problèmes et ses responsabilités. À travers les diverses dominatrices qui apparaissent de manière aléatoire et inopportune dans la vie de Katayama, le film explore les notions de pouvoir, de soumission, et de désir de souffrance.

Chaque dominatrice, ou Reine, a son propre style, personnifiant différentes formes de domination et d’humiliation, mais toujours avec une pointe d’humour surréaliste :

La Reine du Fouet : spécialiste du fouet, elle poursuit et attaque Katayama avec une maîtrise impressionnante, lors d’altercations en extérieur. Elle incarne une forme agressive de domination, exacerbant les situations absurdes et humiliantes.

La Reine de la Violence est brutale et directe. Elle utilise des méthodes de torture, d’agressions physiques et des actes de force pure pour écraser sa victime. Bien que ses actions ne soient pas aussi développées que celles d’autres Reines dans le scénario, elle est associée à des scènes où Takafumi est physiquement malmené, que ce soit à coups de poings, de fouets ou dans des situations d’agression physique extrême. Elle représente l’aspect le plus primal et direct du sadomasochisme, où la violence devient un moyen d’expression total, dénué de subtilité.

La Reine de la Destruction détruit les biens matériels de Katayama de manière méthodique et implacable, symbolisant sa perte de contrôle totale. Elle marque une escalade dans les conséquences du contrat, montrant que les « Reines » ne respectent aucune frontière.

La Reine des Voix intervient plus tard dans le film, lorsque Takafumi commence à sombrer dans un état de confusion et de désespoir croissant. Elle s’attaque à sa perception de la réalité en imitant les voix de ses proches, et représente une forme de domination purement psychologique, où la victime est contrôlée non pas par des actions physiques, mais par une intrusion dans son esprit.

La Reine de la Salive, obèse, a une obsession pour cracher sur ses victimes. Elle apparaît à la fin et envahit l’espace privé de Takafumi pour lui cracher dessus de manière particulièrement raffinée, mais meurt victime d’un accident tout aussi absurde que son comportement.

La Reine de la Gloutonnerie incarne la voracité et l’excès, et montre à quel point le Club de Bondage pousse les choses à des niveaux inimaginables, allant jusqu’à dévorer la femme de Takafumi, puis son beau-père. C’est une métaphore grotesque de la manière dont le Club détruit tout ce qui compte pour lui, y compris ses liens familiaux et ses dernières attaches émotionnelles.

La PDG du Club : dominatrice d’une taille gigantesque, elle est l’incarnation ultime du pouvoir et de la domination. Mystique et presque invincible, elle représente le sommet de la hiérarchie du Club de Bondage. Elle est le symbole de l’impossibilité d’échapper au contrat. Sa confrontation finale avec Katayama est à la fois absurde et grandiose, mélangeant horreur et comédie.

Une particularité du film est sa narration, qui inclut des interruptions où des cadres de cinéma discutent du film qu’ils regardent. Ces scènes interrogent la logique et la structure du film lui-même. Ce dispositif ajoute une autre couche de réflexion, se moquant à la fois des conventions cinématographiques et des attentes des spectateurs.

En raison de sa nature unique et déroutante, « R100 » a divisé les critiques. Certains le considèrent comme une œuvre avant-gardiste qui explore les limites de la comédie et du cinéma, tandis que d’autres le trouvent incohérent et difficile à suivre. L’humour et la présentation volontairement exagérés des scènes BDSM peuvent dérouter les spectateurs qui s’attendent à un film plus conventionnel sur le thème.

Mais au-delà de l’humour, « R100 » aborde des thèmes existentiels liés à la vie, à la souffrance et à la recherche de sens dans une existence monotone. Katayama se perd dans un monde de douleur volontaire, mais cela reflète la complexité de sa vie et ses émotions réprimées. Le BDSM, dans ce contexte, devient un moyen d’explorer son propre besoin de catharsis émotionnelle et physique.